Rencontre littéraire avec Emma Marsantes
En partenariat avec la librairie l’Embarcadère, le CCP a eu le plaisir de recevoir Emma Marsantes pour son nouveau roman Les fous sont des joueurs de flûte paru en janvier 2024 aux éditions Verdier. Ce roman fait partie d’une trilogie qui a débuté avec Une Mère éphémère en 2022 et sera suivi du nouveau roman dont l’écriture a démarré lors de sa résidence à St Nazaire organisée par le CCP.
Après une présentation de l’autrice et du CCP par Claude Hennequière, Erick Lermusiaux a mené le débat très riche sur l’emprise et la violence dans les familles. Les nombreux échanges entre le public et l’autrice ont été ponctués par la lecture de petits textes par Dominique Bommé témoignant de cette violence familiale à commencer par son père puis le mariage, et la maternité.
L’écrivaine manie la plume avec de nombreuses images issues de son passé de photographe, donnant des paragraphes aux textes courts, des phrases où l’adjectif suffit pour décrire cette emprise. La narratrice s’adresse à « Vous » en un long réquisitoire. « Vous », jamais nommé, est l’un de ces fous joueurs de flûte qui cachent leur noirceur derrière un masque et qui charment leurs victimes. « Vous » est un séducteur autant irrésistible qui a emprisonné Mia dans la perversité de son emprise. Ce roman est aussi le roman d’une libération. En rappelant le passé difficile de l’enfance de Mia, il semble aussi poser la question de la victimisation ancrée dans les traumatismes d’une enfance violentée. Pour rendre compte de la force de ce texte, il convient de mettre en valeur l’écriture qui apporte au roman toute sa puissance et son originalité : une écriture au service de ce qui est difficile à dire, à faire entendre, une langue réinventée qui participe pleinement à la force de ce qui est confessé : emploi de mots déroutants, recréés dans un assemblage parfois surprenant, empilement de phrases comme s’il fallait dérouler sans fin le fil qui se veut une confession, proche parfois du chant homérique. Le texte, malgré le sujet, est aussi empreint de poésie : Emma Marsantes réussit à y glisser son talent de poétesse.
Erick le modérateur a permis aux personnes de s’exprimer à travers de nombreuses expériences de violences familiales. On attend le dernier livre qui reviendra sur l’enfance de la mère de Mia et qui se passe dans la région nazairienne.
Voici un petit extrait des lectures :
« Je vis en très léger recul de mon obsession d’en finir. Respiration quasi muette où, tout occupée à la pensée du faire, à sa scénarisation, pourtant, je ne le commets pas. Seul le passage à l’acte pose le diagnostic et jusqu’à lui je demeure en de ça. Rassurances. Folle, je le deviens et je ne le deviens pas. »