Le prix Pelloutier 2024 est lancé !
Le 19 octobre dernier s’est déroulé la soirée de lancement du prix Pelloutier 2024 : RE-trouvaille à la la P’tite scène des Halles.
Les membres du comité de lecture ont lu des extraits des livres sélectionnés pour le prix Pelloutier 2024 : Le voyageur une BD de Théa Rojzman (scénario) et Joël Alessandra (dessin), Les montagnes russes une BD de Gwénola Morizur (scénario) et Camille Benyamina (dessin), Shit ! un roman noir de Jacky Schwartzmann, Le gosse un roman de Véronique Olmi, L’oiseau blanc un court roman de Cathie Barreau, Oublié dans la rivière un roman-enquête de Françoise Moreau, Dernière visite à ma mère un récit de Marie-Sabine Roger.
Une lecture organisée mais sans que les thèmes, ni les titres ne soient dévoilés… un public attentif qui les a tous découvert.
Nous voici arrivé à Vinci. C’est vivant ici je n’ai jamais voyagé. C’est le village d’enfance de Léonard. Mais, mais on dirait moi quand j’étais enfant. Oui, il nous attendait. Patrick ? Sors de là, ne reste pas comme ça, vient... Tu n’as pas besoin des gens, ni des études, ni des parents pour découvrir la vie mon petit. (Le voyageur) A l’école, il apprend à compter, à lire, à écrire, à tomber amoureux de la patrie, le monde devient plus grand que son quartier, un espace mystérieux s’ouvre à lui, il comprend que tout à un nom et demande à l’instituteur comment s’appelle ce qu’il ne peut pas nommer, mais l’instituteur ne connaît pas tout, comment le pourrait-il, comment aurait-il le temps et surtout le cerveau pour apprendre par cœur les mots du dictionnaire Larousse, des encyclopédies, des atlas, des herbiers, des planches d’anatomie et des cartes de géographies ? (Le gosse) On m’appelle Lucas ? Ma mère en avait décidé ainsi. Sur mon acte de naissance et mon passeport, il est écrit : Augustin-Lucas Lucien Blé. Jamais mon prénom n’était prononcé dans son entier. Ceux qui l’avaient imposé, mes grands- parents à mon père qui a obéi tel un fils soumis, s’étaient contentés de le savoir écrit. Eux-mêmes n’avaient pas pu faire revivre leur oncle disparu. Augustin, ce nom n’arrivait pas sur leurs lèvres. Cette volonté morbide de donner le nom d’un mort lointain à un enfant les quitta quand ils virent le bambin vivre comme l’être singulier que ma mère et finalement mon père aussi souhaitaient. A la naissance de ma sœur, il n’était plus question d’inviter les ancêtres… Ma sœur et moi ne portions aucune attention à tout cela, nous étions des enfants heureux. (L'oiseau blanc) Tu sais, ce qui m’a toujours énervé avec les enfants, Dounia ? Les petits garçons veulent être médecin, les petites filles, infirmières. Tu trouves ça normal, toi ? – Je ne sais pas. – Bien sûr que non. Il faut oser vouloir être médecin, tu comprends ? Et toi, avec tes capacités, je veux que tu sois ministre de la santé. C’est ce que tu dois viser. Tu n’as pas le droit d’abandonner à ton âge. – Mais les études, Monsieur Morel ? On ne peut pas, c’est trop long… – Dounia, arrête de croire que c’est impossible. (Shit !) Apparemment, Charlie n'est pas rentrée, les enfants sont seuls. Julio pleure, il a l'air malade, elle a peur (sa sœur). Je suis inquiète, je n'ai pas vu Charlie ce matin et je n'ai pas fait les départs ce soir. Je n'ai aucune nouvelle, c'est pas normal. C'est pas la première fois qu'elle les laisse tout seuls, mais c'est la fois qu'ils m'appellent au secours. Je ne vais pas laisser 3 enfants paniqués au milieu de la nuit ! (Les montagnes russes) Et puis, il y a le petit dernier de Marie, son plus longtemps choyé probablement, parce que le giron, les bras ne sont plus réquisitionnés par un nouveau-né. Et choyé aussi des aînés comme il arrive souvent pour les derniers. Jean-Baptiste, sur l'état civil, mais on lui dit Jean, c'est plus rapide, plus simple, ou Baptiste, parfois les deux. François et Jean font une paire. Ainsi vont les fratries nombreuses où des duos font durablement intimité. (Oublié dans la rivière) Comme elle était fragile et comme elle était sage, et grave, et réfléchie, petite fille au seuil de la cour de l’école, timide ne sachant pas ce qui va advenir, appliquée à bien faire. Sa jolie blouse à fleurs comme un beau tablier. (Dernière visite à ma mère)
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La fécondation a marché, plusieurs embryons se sont développés de manière optimale. Nous allons vous en réimplanter trois, puis vous pourrez rentrer chez vous. Vous connaissez la suite : période de nidation. Vous reprenez le cours de votre vie de façon tout à fait normale. Dans 14 jours, vous effectuerez une prise de sang dans un laboratoire qui vous indiquera si vous êtes enceinte. (Les montagnes russes) Marie Lecerf a 70 ans et on peut la représenter avec sa coiffe blanche, ses vêtements noirs protégés d'un tablier, lui-même couvert peut-être d'un sac de jute, parce qu'elle s'en vient de traire les vaches, de nourrir les cochons ou de gratter son jardin, mais ça n'a pas tant d'importance, on n'a pas besoin de se la figurer jusque dans les détails, façon musée des arts et traditions. C'est une mère, voilà ce qu'il faut savoir. (Oublié dans la rivière) Tu n’embrasses pas ta mère ? Bonjour maman. Il faut que tu m’emmènes chez le docteur Bertot demain. Bien sûr, à quelle heure ? A 14 h je te l’ai déjà dit ! Clac (une claque) Tu te souviens que c’est mon anniversaire aujourd’hui ? Oui bien sûr mon chéri ! Je commande une pizza. Fais comme tu veux. Tu sais très bien que je n’ai pas faim... Je suis rentré ! Tu te souviens quand j’étais petit et que je m’enfermais dans le placard de ma chambre ? Pas du tout et rallume la télé maintenant c’est l’heure de « la vie plus Belle » (Le voyageur) Alice descendit vers la maison de Catherine à vive allure et nous la suivîmes du regard, inquiets. Grégoire m’annonça que Solange n’était pas de retour. Catherine, qui devait repartir dans ses montagnes pour les funérailles de son frère, pensait appeler l’assistante sociale comme elle l’avait déjà fait. Elle hésitait et savait que cette fois-ci le verdict serait le retrait de l’enfant à sa mère. Les fugues, les marques de coups sur le corps de la petite, les disparitions de la mère qui l’abandonnait et la laissait chercher refuge chez Catherine ou chez Louise, tout plaidait dans ce sens. Le village les avait protégées l’une et l’autre jusque-là. (L'oiseau blanc) A présent tu as besoin d’un déambulateur et tu vas à pas minuscules, concentrée sur ta trajectoire. Tu as grossi, j’ai remarqué aujourd’hui même que tu es vite essoufflée . Bien trop vite je trouve et pour de si petits efforts. Je m’inquiète d’un cœur fragile. Ton cœur tiendra maman. Il tiendra trop longtemps. Tu auras beau vouloir en finir, dès ton arrivée à l’EHPAD, tu auras beau me le dire chaque jour au téléphone… (Dernière visite à ma mère) Il aime regarder les mains de sa mère, rouges et bleues, jaunes et vertes, ça dépend des jours, et les entailles au bout des doigts, ce sont des mains rugueuses et habiles, qui ne se posent jamais. Il aime regarder son visage qui rougit si vite, le bleu de ses yeux avec les paupières trop lourdes, et ses cheveux dorés qui sont bouclés à cause de la vapeur. Sa mère les préférerait lisses, mais la vapeur de l’atelier les décollent en petites mèches qui s’entortillent, des dizaines d’accroche-cœurs, elle dit : « J’ai les cheveux libres et désordonnés comme moi » et elle rit de son rire aigu de Parisienne… (Le gosse) Lorsque j’ai eu mon concours de CPE, maman m’a payé un Vorwerk. Je n’ai pas compris comment on pouvait dépenser mille deux cents euros dans un robot ménager ; j’ai encore moins compris que l’on m’en offre un, à moi. (Shit !)
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Chère maman, j’espère que tu vas bien à Paris. Je découvre l’Italie, c’est merveilleux de voyager. Geneviève te salue, je te la présenterai à notre retour. Gros bisous de ton fils qui t’aime. Patrick. (Le voyageur) Au début c’est presque drôle, la bagnole est tellement vieille, on dirait qu’Augustin conduit un âne malade, elle grince et a des ratés, de brusques hoquets. Au début il y a la joie de quitter Paris, de rouler la nuit, de rejoindre le but de Joseph. Ils se disent que ceux qui partiront en congés payés seront aussi excités qu’eux, le pays va devenir celui de vieux enfants émerveillés, ils rient, ils parlent pour faire passer les heures, et puis au fil du temps l’angoisse est là, l’intuition mauvaise qu’ils n’ont aucune idée de ce qui les attend. (Le gosse) Matinée ou après-midi, les pas de Baptiste vont pareillement sur des chemins de cailloux jaunes entre les parallèles des ornières de charrette. Il marche au milieu, sur la crête piquée de pissenlits, de trèfles égarés. Des chemins où on peut compter sur l'aubaine d'un attelage qui vous économise en vous prenant à bord. (Oublié dans la rivière) Le temps était venu de partir plus loin. J’avais à passer quelques semaines au Québec avant les solitudes du Nord... Je n’ai pas eu ce blues, ce cafard des premiers temps d’exil cette fois-ci, ce serait pour plus tard. A Montréal, l’automne m’a redonné la voix, j’écoutais le parler des amis vite rencontrés, j’entendais mon lent débit de renaissant qui ne savais plus quel rythme prendre, quelle scansions adopter. J’avais perdu mes parents, il me fallait réapprendre à parler. Le français des Québécois m’a engendré, il était nouveau. Pourtant je percevais des phrasés qui se rapprochaient du patois de notre Ouest français. (L'oiseau blanc) – Vos enfants sont où, Madame Ramla ? – Chez leur père. Et arrêter de m’appeler Madame Ramla. Moi, c’est Myriam. – OK. Moi, c’est Thibaud. – J’ai eu votre petit mot. Vous pensez à quoi exactement ? – J’ai eu un problème avec les 4000 € pour le voyage scolaire. Je les ai donné à quelqu’un qui m’a fait un chèque en bois. Bref… C’est mort. je pensais essayer de vendre un peu de shit pour récupérer cette somme. – Vous êtes sympa, vous, dis donc. Si vous cherchez des chèques en bois, je peux vous en faire plein. (Shit !)
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Il s'en va sur une terre aujourd'hui disparue, mosaïque de petites pièces bocagères ourlées de haies épaisses gorgées de bêtes à poils et à plumes et de sentiers creux. Le chahut des oiseaux, les senteurs d'été, chèvrefeuilles, haies chaudes, herbes foulées accompagnent la fête dans sa tête. (Oublié dans la rivière) L’air pur est saturé de soleil, Joseph ne distingue rien autour de lui, c’est trop grand, d’un jaune sec, presque blanc, il regarde cette immensité ; des champs et des champs, mais où sont les gens ? Il peut voir si loin qu’il a l’impression que le ciel avale le paysage, au loin l’horizon s’effondre, il se dit, si on marche longtemps, on tombe. (Le gosse) Le paysage est peut être essentiel dans ce tableau. Regardez ce pont et cette rivière… La Joconde ne serait-elle pas aussi une évocation du temps ? Le temps qui passe et rend la beauté, un sourire, la vie humaine, éphémères… Ce tableau est scandaleux pour l’époque une femme souriante plantée devant un paysage quasi imaginaire et plutôt inquiétant, comme immémorial, préhumain... Il n’y a qu’une règle : ouvre l’œil petit, ouvre l’œil sur tout et tout le temps. Oui pépé. Et retourne dans la nature ici il n’y a que des fous qui ont oublié la Terre. (Le voyageur) Ce samedi, c’était encore l’été et nous fîmes chemin vers les salines. Les fossés vides et boueux attiraient maints oiseaux qui n’avaient pas encore migré. Grégoire aperçut deux sternes blanches dans leur vol sur place. Le nez en l’air, nous sommes restés un moment immobiles. Elles quittèrent le ciel au-dessus de nous dans un battement d’ailes rapide. Nous approchions des salines où la végétation plus basse abandonnait les aulnes et les tamaris. Des bécasseaux survolaient les vasières loin, puis, dans un vol vif et capricieux, ils s’approchèrent de nous. (L'oiseau blanc) Le temps est à la pluie et mon cœur à l’automne. Une image bien trop facile, je n’en suis pas fière, loin de là, pourtant c’est ce que j’éprouve, à cet instant précis. Je ne sais pas l’exprimer autrement. Je m’effeuille, je me dépouille, je deviens rameau sec, bois nu. Je me prépare au grand froid de l’hiver, à ton départ, car il viendra. Nous en sommes déjà aux premières gelées. (Dernière visite à ma mère) Elle a suivi des études, obtenu un concours, mais son cerveau reptilien à céder la place à un cerveau waltdisneyen. Elle croit que ce qu’il serait préférable est réel. Elle serait capable d’interdire les documentaires animaliers parce que ces cons de tigres n’agissent pas comme elles le souhaitent. Rendez-vous compte, ils bectent des gazelles, avec mise à mort sans pitié, déchiquetage en règle de la carcasse et festin plein de sang sur les babines. Non, la nature n’est pas progressiste. Et non, définitivement, la nature n’est pas cool. (Shit !)
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Musée du Louvre, Paris France. Ils m’emmerdent tous là ! Tous ils m’emmerdent. Vous savez que le musée reçoit carrément des lettres adressées à Mona Lisa ? Ah, ah, ah les gens sont fous. Tu pourrais dire à Geneviève , la moche de la billetterie qu’elle a encore oublié de prévenir les gens que ça ferme à 18h ? Tu ferais mieux de bosser au lieu de faire chier le monde. (Le voyageur) La petite Marie Quilly a 14 ans. Elle est la dernière de sa famille nombreuse, alors on l’a placée là, vu qu’on n’avait pas besoin d’elle à la ferme paternelle et qu’elle est en âge de gagner sa pitance. Elle apprend le métier avec Félicité Boufsard, domestique, plus ancienne dans la maison, qui du haut de ses 27 ans, la dirige pour que tout marche au mieux comme le souhaite Madame. Elle apprend à frapper aux portes avant d’entrer, à porter un verre ou une tasse de camomille sur un plateau, à articuler et à parler son meilleur français à Monsieur et Madame, ce qui lui fait à n’en pas douter un sacré apprentissage. (Oublié dans la rivière) Il vivait seul, son père était parti pour la ville, mais dans le village on n’est jamais vraiment seul. Il y a toujours des travaux à partager, un toit qu’on refait ensemble, un arbre à abattre, une conche dont les bords sont effondrés et qu’il faut relever, les salines où on va donner un coup de main, ou une fête. (L'oiseau blanc) Tu comprends Joseph, chaque maison a ses secrets, c’est pour ça qu’on ne change pas de maison. Ce que je t’ai dit, tu n’en parleras jamais à personne, tu me le promets ? Il imagine sa mère dans cette maison aux secrets, entourée de tant d’autres filles, presque cinquante, et de très peu d’hommes, parce que plumassières, c’est pour les filles, il faut de toutes petites mains, habiles, légères, et patientes aussi, elles font tout le beau travail et laissent aux quelques hommes de la maison le tri des plumes, la teinture, les livraisons et l’entretien des machines, et il imagine que ces hommes ressemblent à son père sur la photo du mariage, ce sont de gros gars engoncés et patauds, qui obéissent aux filles habiles et pleine de secrets. (Le gosse) Je comprends votre affection pour cet enfant et je reconnais vos compétences professionnelles. Cette femme était furieuse ! si jamais elle arrive à prouver que vous avez emmené son enfant à votre domicile... A compter de maintenant, vous êtes suspendue, en attente de connaître la suite. Mais là, je risque mon poste et le vôtre avec, vous comprenez ? Je vous demande de rester à distance de Julio et de sa famille, sans quoi vous vous exposez à de graves poursuites judiciaires. Je vous promets que je vais tout faire pour que vous ne soyez pas licenciée. Cette psychologue qui a du te voir, moins d’un quart d’heure, deux ou trois fois et qui ne sait rien de toi me débite imperturbablement son discours rassurant, bébête. Bien rodé. Les aides soignantes s’apitoyaient, te caressaient les cheveux « pauvre petite mère... (Les montagnes russes) Il m’est arrivé plusieurs fois d’arpenter en vain tout l’étage à la recherche de quelqu’un qui pourrait te changer, ou te remettre au lit. Je finissais invariablement par descendre au bureau des infirmières, quand le bureau d’accueil était vide. L’EHPAD, sans équipage. Navire abandonné. (Dernière visite à ma mère) Maman, professeur des écoles de son côté, dit que nous resterons toujours des prolétaires, quoi que l’on fasse dans la vie. L’âme prolétaire de Simon prend de moins en moins de place. Elle tient dans la boîte à gants de son Audi S7 Sportback Quattro flambant neuve à 100 000 balles. Nous évitons le sujet, afin de préserver l’ambiance des repas de famille. Est-ce que l’on s’entend ? L’unique valeur, pour Simon, est le travail. Il réduit toujours les gens à cette variable et évalue leur score, suivant une espèce d’échelle de Richter du taf. Qu’un gars soit un acharné de boulot, on ne regarde pas trop le reste. Il est infecte avec sa femme ? Odieux avec les enfants ? Il tue des adolescentes, les découpes à la scie égoïne et balance les morceau à ses chiens ? Certes, mais attention : c’est un sacré bosseur. (Shit !)
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Le silence grandit comme un mur qui se bâtirait jour après jour, il empêche de bouger, et parfois de dormir, alors Joseph ose demander à la grand-mère où est sa mère, il veut parler de sa tombe, du cimetière, quelque part où lui rendre visite, mais elle répond : « Je ne crois pas à ces sornettes », comme si lui aussi, comme les voisines, pensait au ciel et à l’enfer. (Le gosse) C’est ma fille...enfin telle que je l’ai vue là-bas. Là-bas ? Oui , elle est décédée en 1992. J’ai vu son visage quand Mona s’est retournée , c’était horrible. J’ai 50 ans. J’ai assez attendu, si tu ne me le dis pas je te tue ! Patrick calme toi je t’en prie... Papa ! Papa ! Tu reviens à quelle heure ? Tu me diras un jour qui était mon père ? Ah ! Mais tais toi donc, j’entends rien ! J’ai besoin de savoir, ça fait 40 ans que je te demande. Je te l’ai déjà dit c’est pas tes affaires, c’est des affaires de grandes personnes ! Et puis tu sais très bien que ça donne de la dépression ces histoires du passé ! C’est ça que tu veux ? Bien sûr que non maman. (Le voyageur) Entre Liban et Canada, j’étais revenu pour enterrer mon père et ma mère dans le cimetière de la lande. Les larmes n’avaient pas surgi là. C’est plus tard, dans la solitude de la forêt du Nord que je sentis leurs présences en moi et que le chagrin émergea. L’annonce de l’accident m’avait rendu muet, dans l’incapacité, dans l’incapacité de parler avec quiconque, sinon au prix d’un effort qui laissait entendre une voix sourde et basse. « Une voiture anglaise a oublié de rouler à droite », me disait-on au téléphone. Je ne pensais pas à poser des questions, à entendre des précisions sur les circonstances. C’était trop, j’avais perdu ma sœur et mes parents. A quarante ans, j’étais orphelin et seul. (L'oiseau blanc) Je suis là, impuissant. Lui dire quelque chose ? Quoi ? Que ça va aller ? Il sait très bien que non. Peut-être qu’effectivement, dans la mort, cela se passe bien, mais moi, là , tout de suite, je n’en sais foutre rien. Alors autant me taire. Je le regarde dans les yeux. Madame Ramla, entre à son tour, il tend la main, elle l’a saisi, et c’est terminé. Halim est parti les yeux écarquillés, sidéré d’être mort. (Shit !) Tu avais beau la qualifier de « vieille baraque » de « nid à courants d’air », tu avais beau en parler toujours en soupirant, devoir la quitter a été un bouleversement, un deuil qui a suivi de quelques années à peine la mort de ton mari . Mon père… Tu es très âgée, maman. Tu vas bientôt mourir . Je n’ai pas peur de la mort. Tu ne la crains pas non plus. Tu es d’une sérénité qui me semble solide. Et la mort n’est pas triste. (Dernière visite à ma mère) Jean-Baptiste Caharel, 25 ans, a été retrouvé noyé dans le Don, au solstice d'été. Et personne n'y comprend rien, ni sa famille, ni ses connaissances. Parce que ça fait parler évidemment ! Autant à Guémené qu'à Vay, au lavoir, au café, à l'épicerie, à la forge, les curieux, les résignés, les taiseux ruminent autour de l'inévitable brasseur d'air qui abat ses il aurait fallu, je l'ai toujours dit, ya qu'à et y'avait qu'à pas. Jusqu'à ce qu'un agacement généralisé lui cloue le bec : « Mon pauv' Ugène, sans toi et la merde de chien blanc, y'en aurait-y des haies de broutées ! » (Oublié dans la rivière)
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Les thèmes évoqués (par ordre alphabétique) :
L’enfance – La mère – La mort – La nature – Le travail – Le voyage
Nous avons poursuivi par un petit jeu d’écriture : Choisissez un ou plusieurs titres de la sélection et écrivez trois phrases pour retranscrire ce que le ou les titres vous évoquent.
Voilà quelques-uns des textes produits en quelques minutes.
Parfois les grand-mères racontent des choses qu’on écoute mal . Il y a belle lurette, ma grand-mère Marie-Antoinette m’a dit une chose qu’elle tenait de son père et probablement cette rivière fait ressurgir à fleur de mémoire le petit conte de ma grand-mère.
Dominique
Orphelin, sans attache, délibérément humilié. Le long périple d’une enfance gâchée.
Jean Louis
Il passait ses journées assis derrière la fenêtre à regarder l’activité qui se déroulait dans l’avenue . Puis un matin, il décida de se lever et de descendre, imiter les passants. Pour lui c’était une véritable aventure, et soudain il se pris pour « Le voyageur ».
Odile
A la p’tite scène face aux halles, Françoise Moreau rencontre Cathie Barreau. La nature entame le voyage et Joël Alessandra croise Gwenola Morizur. Véronique Olmi nous conte la vie de Joseph tandis que Jacky Schwartzmann deale pour le dernier séjour de la mère de Marie-Sabine Roger. Jolie rencontre autour d’un verre rempli de littérature.
Dominique
Désormais nous devrons voyager dans les tableaux pour reposer la nature exténuée. De l’enfance à la mort nous nous nourrirons d’art et de culture.
Michèle
La rivière de l’oubli raconte une légende, la légende du voyageur, un oiseau blanc posé sur l’épaule, traversant des montagnes russes, suivi d’un gosse, allant rendre une dernière visite à sa mère, oubliée dans la rivière.
Patricia
Il était perdu le voyageur, perdu dans ce hall de gare, immense. Il ne savait plus quel train prendre, où aller. Perdu il était.
Claude
Si le shit était légalisé, que se passerait-il ?
Fin du trafic, le monde entier, le sourire aux lèvres, la tête dan,s les nuages à méditer. Rouler en Audi, c’est beurk, rouler en vélo c’est hype, à quand la téléportation ?! Quand je serai grand je serai CPE, je serai le cerbère du collège, le grand Ayatollah de la punition, maître du fouet, tremblez ! !
Pierre
Rêver, sensible, pas de limite
Espoir, vide et grandeur
Sino
Bref… une belle et joyeuse soirée… qui sera suivie de nombreuses rencontres avec les auteur·rices de la sélection.